Patty Dickson Pieczka

Lost in a place 

where angular words 

lodge in my throat,

half–formed thoughts

dust down from their stanzas

into a pile on the page.

A loose thread

of dangling participle

ravels the poem, opening 

a door in its wall

where sunlight shifts

over mimosa leaves,

emptying their veins

to the paper.

Patterns of shadow

and light soak in.

I wring out the page,

twist it until magic spills.

Vowels alliterate 

from the beaks of doves; 

the poem spreads its wings.

OSIRIS 96, 2022

Sylvie Poisson

Méditation 2 

Tes sourires, les lueurs dans tes yeux, tes tremblements emmêlés. Tous tes visages disséminés dans le littoral du temps, leurs teintes insouciantes, leurs poussières lourdes. Tous tes possibles inachevés, rivières errantes au creux de tes âges. Chacun de tes balbutiements pour arriver au chant. 

Quelques miettes d’enfance au creux de ta main, tu mendies pour réparer la mémoire. Le firmament tremble encore sous tes paupières. Tu cherches l’envers des heures de l’autre côté du crépuscule. La rumeur consolée de ton sang. Quelques brins de lumières au creux de ton âme, tu persistes à trouver des embellies. 

Tremblante d’exister, tu balbuties des mots venus de tes nuits. Tu sondes les ombres, ériges un pont que tu traverses, une douce brise répandue sur tes épaules. Le silence apaise tes égarements. Tu touches la beauté. Tu résides neuve dans l’instant. 

OSIRIS 94, 2022

Ray Malone

ÉTUDE 21

so we spoke, well into the night, of selves

mingling, meetings held in the mind, trying

to find a way through the words, to where

there were none, no one for what there was

to say: the blackberry, say, bearing the weight

of a poem, the distant fruit of forgetting,

the bare facts of being there, remember, your hand

reaching in to the bramble, the arch of thorns,

for the taste to come, and the trace that

lingered, long after the dark, of parting,

the stain fading: the light goes, the lack

remains, the music merely repeats itself,

my ear to it, but no more mine than the ear

that first heard it, reached up to it,

to draw it down to the touch, to the fingers

writing it, gently now, the promise between them:

we met, so the words say, somewhere,

in search of memory, the mind’s freight

dragged through the tract of days: we spoke:

of selves enduring the night’s silence

Osiris 96, 2022

Jean-Yves Reuzeau

Comment serrer le diaphragme

Nappes de sons. Salve de silence. Nuit dilatée.

Les danseurs s’éveillent à l’aube. Muscles tendus.

Dans un tournoiement de lumière. De souffle.

Les notes palpitent. Rythme infini derrière les yeux

Clos. C’est pour oublier. Écarter la mort si proche.

Pour passer un nœud coulant au cou du désespoir.

Car les matins reviennent. Les ombres s’absentent.

Nous sentons leur souffle peser sur nos nuques.

Leurs doigts insistants appuyer sur nos vertèbres

Comme sur les touches cuivrées d’un saxophone.

Là où nous cherchons une brèche dans la langue.

Un vibrato. Un mystère tremblant. L’écho virtuose

Des vertiges. Des arpèges. Le cri des instruments.

Osiris 85, 2017

Roland Giguère, Trois Poèmes

À la suite

La nuit brûle à nos flancs

et les lendemains reposent

la main forge une heure de plus

qu’il faudra vivre sans déchirement

le temps coule

la pluie tombe sur l’auvent

comme on écrivait auparavant

on aura tout dit sans blesser personne

on aura tout fait dans l’ombre

et le sillon sera nu

quand vous prendrez la charrue.

***

Nous ne mourrons pas

Nous ne mourrons pas ainsi

sans avoir changé la couleur de nos draps

nous ne mourrons pas assis

au milieu du débat qui pourrit

la lampe éclate sur nos genoux

comme un cri longtemps retenu

la lueur est sauve dans les débris.

***

Vu de dedans

Je n’ai jamais vu ce que vous me racontez

des îles mauves où le soleil est d’acier

je n’ai jamais vu ces vierges qui saignent

sur une plage de parasols salés

je n’ai jamais vu non plus

ce que vous dites être vrai

dans vos périples échevelés

je n’ai vu que vos yeux et j’imagine

sans savoir où aller.

Osiris 15, 1982

Hanne Bramness

Songs without Words

1

I sat near the top of the house, where it got so very

warm, on the landing between the bathroom and the child’s 

bedroom, with its door ajar. I could hear the little rustling 

sounds of the night’s song filtering through to us, like white noise,

accompanied by the hissing in the pipes, and I counted her

even breaths in the summer night. We breathed out,

somewhere in the air the circles of breath ran together.

In the silence, the day loosened its grip. She had quietened down.

I stayed sitting there, listening, sensing fluctuations

beyond my reach; searching for signs in the pale

northern sky. Soon the songs of the birds would drown us out

as we drifted into the first light of day. 

OSIRIS 95, 2022

Flavio Ermini

Traduction de Robert Melançon

LA TERRE RENVERSÉE

Years and years I loved you when you lay in my womb. Joyce

La terre est un entassement de pages douloureuses, qui sont poussées vers le ciel au lever du vent et font penser au souffle.

Là où la sœur du sommeil se cache, se rendent visibles tant de petits murs. « tout annonce ta présence, ma lassitude, notre interminable patienter. »

on n’entend pas un bruit et tout événement s’ouvre en paroles animées qui serrent de toutes parts les choses. commencent ainsi sur la terre bien des récits privés de fondement. « des années durant je t’ai aimée lorsque tu me tendais la main. »

peu avant que la jeune fille se remette à marcher, le temps se met à renverser la terre, à faire tourner le ciel, à vider les maisons et à les emplir de nouvelles voix.
sans ce souffle, les lèvres se glacent et se serre le cœur.